Amazon vient d’annoncer une baisse significative de ses frais vendeurs en Europe, présentée comme « l’une de ses plus grandes réductions de frais » jamais mises en œuvre. À partir de décembre 2025 et tout au long de 2026, les vendeurs tiers verront reculer à la fois les commissions sur vente (referral fees) et une partie des frais logistiques liés au programme Expédié par Amazon (FBA) dans les principaux pays européens.
Cette révision tarifaire s’inscrit dans un contexte de concurrence très forte sur les produits à bas prix, notamment face à Shein et Temu, qui ont bousculé les segments de la mode, de la maison et des petits gadgets. Pour les PME comme pour les grandes marques, comprendre le détail de ces baisses et leurs contreparties devient essentiel afin de repenser leurs prix, leurs marges et leur stratégie sur la marketplace.
Une baisse présentée comme historique pour les vendeurs européens
Le 2 décembre 2025, Amazon a officialisé une vaste mise à jour de sa structure de frais pour l’Europe, couvrant le Royaume‑Uni, l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne et plusieurs autres marketplaces de l’UE. L’entreprise met en avant une diminution moyenne d’environ 0,15 £ / 0,17 € de frais par unité vendue en 2026 pour les vendeurs européens, tous ajustements confondus. Ce chiffre agrège à la fois des baisses de commissions, des réductions FBA et l’extension de tarifs avantageux pour les produits à bas prix.
Dans sa communication officielle, Dharmesh Mehta, VP Worldwide Selling Partner Services, explique que ces changements visent à mieux « aligner » les frais sur les coûts réels du réseau logistique et à renforcer la compétitivité des vendeurs indépendants. Amazon insiste sur le fait que plus de 60 % des ventes dans ses stores proviennent désormais de vendeurs tiers, dont une majorité de PME européennes. Toute évolution tarifaire a donc un impact direct sur des centaines de milliers d’entreprises.
En toile de fond, Amazon revendique également une logique de long terme : soutenir la croissance durable des petites et moyennes entreprises, en leur permettant de proposer des prix plus attractifs aux consommateurs finaux. Les gains d’efficacité opérationnelle réalisés par le groupe seraient ainsi en partie « reversés » aux vendeurs sous la forme de frais réduits, afin de rester compétitif dans un environnement où les plateformes ultra‑discount multiplient les offensives.
Mode : une réduction ciblée des commissions sur les vêtements et accessoires
La première vague de baisses intervient dès le 15 décembre 2025 et cible un secteur clé : l’habillement et les accessoires. Dans toutes les marketplaces européennes, Amazon réduit fortement les referral fees pour la catégorie Clothing & Accessories / Vêtements et accessoires. Pour les articles dont le prix est inférieur ou égal à 15 € / 15 £, la commission passe d’environ 7,8 % à 5 %, ce qui représente une réduction notable pour les vendeurs de mode à très bas prix.
Pour la tranche de prix située entre 15 et 20 € / 15 et 20 £, la baisse est encore plus spectaculaire : la commission tombe de 15 % à 10 %. Cet ajustement concerne une grande partie des articles de mode d’entrée de gamme vendus sur la marketplace, des t‑shirts et sweats aux accessoires tendance. Amazon indique clairement que l’objectif est d’aider les vendeurs à proposer des tarifs compétitifs sur ces segments particulièrement sensibles au prix.
Cette offensive tarifaire répond directement à la pression de Shein et Temu, dont les commissions oscillent autour de 10 % en Europe, avec parfois 0 % pour les nouveaux vendeurs sur une période limitée. En repositionnant ses frais de commission sur des niveaux comparables, voire inférieurs pour certains paniers, Amazon tente de conserver son attractivité auprès des marques et des revendeurs de mode qui hésitent à multiplier les canaux de vente.
FBA et logistique : baisse des frais colis et extension du « Low‑Price FBA »
Outre les commissions sur vente, Amazon agit aussi sur un levier central pour les vendeurs : les frais logistiques FBA. À partir du 15 décembre 2025, les frais FBA pour les envois de type « parcels » (colis) sont réduits au Royaume‑Uni, en Allemagne, en France, en Italie et en Espagne. Amazon évoque une baisse moyenne d’environ 0,26 £ / 0,32 € par colis expédié via son réseau logistique dans ces cinq principaux pays européens.
Ces réductions prolongent une première vague déjà intervenue en 2025 et ciblent les offres stockées et expédiées par Amazon. Pour les vendeurs qui s’appuient massivement sur FBA, la baisse cumulée sur l’année 2026 peut représenter plusieurs milliers d’euros d’économies, en particulier pour ceux dont le catalogue est composé de produits légers et à forte rotation. L’impact est d’autant plus visible que les frais de livraison et de préparation constituent une part importante du coût total d’une commande.
À compter du 1er février 2026, Amazon va plus loin en étendant l’éligibilité aux tarifs « Low‑Price FBA » à la plupart des produits affichés à 20 € / 20 £ ou moins. Pour ces articles nouvellement éligibles, l’entreprise anticipe une diminution moyenne de 0,40 £ / 0,45 € de frais FBA par unité. Concrètement, cela renforce la viabilité économique de la vente d’articles peu chers avec FBA, un segment où de nombreux vendeurs peinaient jusqu’ici à maintenir des marges positives.
Maison, épicerie et animaux : de nouvelles baisses de commissions en 2026
La deuxième grande étape de cette refonte tarifaire intervient le 1er février 2026, avec une série de baisses ciblées sur les catégories liées à la maison et au quotidien. Amazon introduit notamment une nouvelle catégorie « Home Products / Produits pour la maison », pour laquelle la commission standard de 15 % est ramenée à 8 % sur les articles au prix inférieur ou égal à 20 € / 20 £. Cela concerne un large éventail de produits : rangements, déco simple, ustensiles de cuisine d’entrée de gamme, petits accessoires ménagers, etc.
Les vendeurs d’articles pour animaux bénéficient aussi de réductions significatives. Pour la catégorie « Pet Clothing & Food / Vêtements et nourriture pour animaux », la commission passe de 15 % à 5 % sur les articles jusqu’à 10 € / 10 £. Dans un marché en forte croissance, porté par l’augmentation du nombre d’animaux de compagnie en Europe, cette baisse améliore la rentabilité des références à bas prix comme les snacks, petits jouets ou accessoires saisonniers.
Enfin, les catégories « Grocery & Gourmet » et « Vitamins, Minerals & Supplements » voient leurs commissions passer de 8 % à 5 % sur les articles jusqu’à 10 € / 10 £. Pour les marques de compléments alimentaires, cafés de spécialité ou produits d’épicerie fine, le gain de marge est significatif, à condition d’ajuster la stratégie de prix et de volume. L’ensemble de ces mesures converge vers un même objectif : rendre plus attractifs les produits de consommation courante et de faible valeur, qui constituent un terrain de jeu privilégié pour les plateformes à bas coût.
Promotions, deals et coupons : des plafonds de frais mieux encadrés
Les opérations promotionnelles représentent un outil de visibilité crucial sur Amazon, mais elles entraînent aussi des coûts supplémentaires pour les vendeurs. Dans le cadre de sa révision globale, Amazon annonce une réduction des plafonds de frais variables liés à certaines campagnes comme les Best Deals et Lightning Deals, dans ses principaux pays européens. Au Royaume‑Uni, ce plafond est désormais fixé à 200 £, tandis qu’il est porté à 300 € en Allemagne et à 100 € en France, en Italie et en Espagne.
Ces nouveaux plafonds viennent compléter une mise à jour de novembre 2025 qui avait déjà abaissé le taux variable et introduit un plafond pour les coupons promotionnels. Pour les vendeurs, l’enjeu est double : sécuriser leurs budgets marketing sur les périodes clés (Black Friday, Prime Day, soldes) et pouvoir mieux anticiper le retour sur investissement des campagnes promotionnelles. Les coûts devenant plus prévisibles, il devient plus simple de tester différentes mécaniques de remise.
Combinée aux baisses de commissions et de frais FBA, cette limitation des frais variables sur les opérations marketing offre un environnement plus favorable aux stratégies agressives de promotion. Elle pourrait encourager davantage de vendeurs à recourir aux deals et coupons pour stimuler leurs ventes, sans redouter une explosion imprévisible des coûts annexes.
Des hausses ciblées en parallèle : stockage, retours et certains pays de l’UE
Les réductions de frais ne s’appliquent toutefois pas à tous les postes. En parallèle, Amazon annonce des hausses ciblées sur certains coûts logistiques afin, selon ses termes, « d’optimiser l’efficacité du réseau ». Sont notamment concernés les frais de stockage mensuels, les frais de retour vers le vendeur (return‑to‑seller) et certains frais de liquidation. Pour les vendeurs qui gèrent de gros volumes ou des stocks lents, ces augmentations peuvent compenser en partie les économies réalisées sur les commissions et le FBA.
Par ailleurs, si les principaux marchés (Royaume‑Uni, Allemagne, France, Italie, Espagne) bénéficient d’une baisse moyenne des frais FBA par colis, la situation est plus nuancée dans d’autres pays européens. Dans les marketplaces des Pays‑Bas, de Suède, de Belgique, d’Irlande ou encore de Pologne, une mise à jour des frais FBA entraîne une légère hausse moyenne d’environ 0,02 €/£ par unité vendue via FBA. Amazon parle d’un rééquilibrage nécessaire pour aligner les coûts sur la réalité opérationnelle locale.
Pour élaborer une stratégie réellement optimisée, les vendeurs doivent donc analyser l’ensemble de la nouvelle grille tarifaire, et pas seulement les annonces de baisse. En particulier, les acteurs qui utilisent systématiquement FBA, maintiennent des stocks importants sur de nombreux pays et gèrent un taux de retours élevé devront recalculer leurs marges pays par pays. L’enjeu sera de vérifier si la baisse globale moyenne de 0,15 £ / 0,17 € par unité vendue se vérifie ou non dans leur propre configuration logistique.
Un enjeu majeur pour les PME européennes et la guerre des prix avec Shein et Temu
Amazon rappelle régulièrement le rôle économique des vendeurs tiers européens sur sa marketplace. Selon ses données, les PME basées dans l’UE auraient vendu plus de 1,3 milliard de produits dans le monde l’année précédente via Amazon, contribuant à la création d’environ 350 000 emplois, dont une part significative en zones rurales. Les ajustements de frais annoncés pour 2025, 2026 s’adressent donc à un tissu économique particulièrement large et diversifié.
Du point de vue concurrentiel, Reuters souligne que ces baisses de frais s’inscrivent clairement dans une « guerre des prix » en Europe, en particulier sur la mode et les produits bon marché. Shein applique des commissions d’environ 10 % dans l’UE et 12,24 % au Royaume‑Uni, avec parfois 0 % pour les nouveaux vendeurs pendant 30 jours. Temu, de son côté, a construit sa croissance sur des prix ultra cassés, en mettant en avant des frais réduits et des subventions massives au démarrage.
En abaissant ses commissions en dessous de ces seuils sur plusieurs segments stratégiques et en réduisant les coûts logistiques sur les produits à bas prix, Amazon envoie un signal fort au marché : la plateforme entend rester le canal prioritaire pour les vendeurs européens qui visent la clientèle de masse. Pour les PME, cela ouvre une fenêtre d’opportunité pour renforcer leur présence sur Amazon sans sacrifier totalement leurs marges face aux géants du discount ultra‑low‑cost.
Derrière la formule « l’une de nos plus fortes réductions de frais », se dessine une véritable recomposition du modèle économique d’Amazon en Europe. Les baisses de commissions sur la mode, la maison, l’épicerie ou les produits pour animaux, combinées à l’extension du « Low‑Price FBA » et au plafonnement des frais sur les promotions, peuvent significativement alléger la facture de nombreux vendeurs, en particulier ceux qui opèrent sur des segments de produits à faible valeur unitaire.
Cependant, ces annonces ne doivent pas faire oublier les hausses parallèles sur le stockage, certains retours et des frais FBA dans plusieurs pays de l’UE. Pour tirer pleinement parti de cette nouvelle donne, chaque vendeur devra procéder à une analyse fine de ses coûts par catégorie, par canal logistique et par pays, puis ajuster ses prix, sa politique de stock et ses campagnes marketing en conséquence. Dans un contexte de guerre des prix avec Shein et Temu, la clé ne sera pas seulement de bénéficier de frais plus bas, mais de les transformer en avantage concurrentiel durable sur le long terme.